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Traumatisme cranien : combattre l’invisible (partie 2)

A l’occasion de l’expertise, il apparait indispensable de confronter la victime à son environnement afin d’évaluer les bouleversements occasionnés par l’accident. Le monde que va découvrir le blessé ne sera plus le même que celui qu’il avait précédemment connu. Le traumatisme crânien modifie la nature propre de la victime et sa relation avec l’autre se trouve altérée. La perception de l’environnement est également bouleversée. Les troubles comportementaux modifient profondément l’attitude de la victime : aboulie, irritabilité, fatigabilité, impulsivité, désinhibition. L’Expert devra alors procéder à une analyse exhaustive de ces troubles du comportement, ce qui nécessitera une grande écoute et une vraie connaissance du traumatisme crânien.


La nomenclature dintilhac et son cadre normatif

L’Expert va devoir se poser des questions substantielles sur la victime :

  • Qui était-elle avant l’accident ?
  • Quel est le tableau clinique face au bilan lésionnel ?
  • Qu’est devenue la victime aujourd’hui ?

Le bilan lésionnel n’est pas toujours aisé à dresser car le traumatisme cérébral est souvent très complexe et son mécanisme nécessite une connaissance certaine de la question.

  • Comment en effet évaluer la gravité du coma ?
  • Comment interpréter son évolution ?
  • Quelles sont les conséquences d’une anoxie ?
  • Comment lire l’imagerie cérébrale ? … Autant de questions auxquelles l’Expert va devoir répondre.

    Il appartiendra ensuite à l’Expert d’examiner le comportement de la victime durant son parcours de soins, d’examiner comment ses troubles ont évolué. Ecouter la victime et les familles est également essentiel. Viendra ensuite le temps des conclusions et l’Expert devra procéder à la consolidation de la victime.

Pour cela, il appartiendra au médecin de solliciter une imagerie récente et éventuellement de se faire aider par un neuroradiologue familiarisé au traumatisme crânien. Il sera bon également de faire dresser un bilan neuropsychologique.
Un ergothérapeute devra également intervenir afin de dresser un bilan écologique du lieu de vie de la victime et voir également quel est le projet de vie proposé à celle-ci par la famille.
Vont devoir également être abordées, à l’occasion de l’expertise, des questions souvent sensibles, tout au moins sur le plan économique, pour les régleurs que sont les compagnies d’assurance.

Il s’agit notamment de la tierce personne qui ne doit plus être abordée seulement en termes d’acte de substitution aux actes élémentaires de la vie courante. Grâce au bilan de l’ergothérapeute, l’avocat et le médecin recours pourront qualifier et quantifier le besoin en aide humaine, qu’il s’agisse de surveillance ou de participation. De même, les aides techniques et le lieu de vie pourront aider à la reconstruction de la victime.

Quel rôle pour l’avocat ?

La situation d’une victime d’un traumatisme crânien est souvent très complexe. Pour l’avocat, il existe un avant et un après.

C’est la période postérieure au fait traumatique initial et à ses conséquences qui interroge l’avocat.

L’avocat spécialisé en réparation du dommage corporel, doit donc prendre la mesure entre le fait traumatique initial et les constatations relevées le jour de l’expertise.

L’Expert quant à lui devra établir le lien de causalité entre ce qu’il constatera le jour J et le bilan lésionnel initial. Beaucoup de juristes non spécialisés en la matière estiment que lors d’une évaluation expertale, il suffit de refaire le parcours de santé de la victime et procéder ensuite à un constat.

Or, ce qu’il est indispensable de faire lors de l’expertise médicale, c’est de procéder à l’évaluation des préjudices et d’analyser les besoins nécessaires pour compenser le handicap. L’autre danger c’est de se borner à corréler la lésion organique au handicap et déterminer ainsi un taux d’incapacité. Il s’agit là d’une erreur fondamentale à ne pas commettre et ce, pour plusieurs raisons :

  • Au-delà de la lésion organique, le traumatisme crânien perturbe l’identité de la victime. Il est donc indispensable d’aborder cette question.
  • La perturbation identitaire créé donc un traumatisme sur le traumatisme qui ne rentre dans aucune case ni aucun barème.
  • De même, le besoin en tierce personne ne doit pas être corrélé au taux d’incapacité et ce, pour les raisons susvisées.
  • Le handicap liée au traumatisme crânien est si complexe qu’il est impossible de l’adapter à quelque barème que ce soit.

Il faut donc faire du « cas par cas », chaque traumatisé crânien doit nécessiter notre plus grande attention.
Le danger est d’appliquer une méthodologie inadaptée qui ne reflèterait pas l’expression du vécu au quotidien de la victime.
Il faut en la matière faire preuve d’une grande humilité dans la mesure où l’imagerie cérébrale ne répond pas à toutes les interrogations et demeure encore un outil limité. Il est donc indispensable de sortir du schéma : « pas de lésion visible donc pas de séquelle objective ».

Nous savons pertinemment que certaines lésions ne sont pas encore accessibles à l’imagerie. Il faut donc demeurer très vigilent en la matière. Très souvent, l’Expert considèrera qu’en l’absence de preuve imagée, aucune imputabilité ne pourra être retenue.

Le débat sera alors déplacé du plan organique sur le plan psychiatrique. Certains Experts pourront même être amenés parfois à penser que la victime simule… C’est méconnaître le « tsunami » engendré par le traumatisme initial qui peut se surajouter à une prédisposition antérieure, ce qui va complexifier le tableau clinique en faisant apparaitre à la fois des souffrances cognitives et psychiatriques.

Expertiser en quelques heures un être vivant déstructuré, broyé, en perte d’identité nécessite une humilité, une écoute et une méthodologie précise.

De nombreux outils existent aujourd’hui pour les acteurs du dommage corporel.

Mais c’est également notre regard qui doit être différent face à des victimes "pas tout à fait comme les autres"

En cas de question, n’hésitez pas à contacter notre Cabinet. C’est avec plaisir que nous nous chargerons de vous renseigner.

Cabinet CONSOLIN ZANARINI Les Avocats de la réparation du dommage corporel

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