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Etat antérieur et indemnisation

Très récemment, la Cour de Cassation, dans un arrêt en date du 16 septembre 2021 (2ème chambre civile n°16-26.014) a décidé de dire que la prédisposition pathologique d’une victime, révélée par le fait dommageable, était une conséquence du fait dommageable lui-même.

Il s’agit là d’une question récurrente opposée par les assureurs aux Avocats des victimes : comment indemniser correctement une victime au regard de son état antérieur ou d’une prédisposition pathologique ?


Etat des lieux

Les assureurs ont l’habitude de considérer que l’état antérieur ou la prédisposition pathologique n’ont pas leur place dans le débat indemnitaire.

Quant à nous, nous considérons qu’il est inconcevable d’écarter des séquelles du traumatisme, ces situations, comme si l’on pouvait séparer le corps de l’esprit… 

En effet, il est de jurisprudence constante que si l’état antérieur fait l’objet d’un suivi médical, il devra être apprécié indépendamment des séquelles du traumatisme. 

En revanche, si par un phénomène de décompensation, la victime développe d’autres pathologies, sans lien direct avec l’accident, il conviendra de considérer qu’il ne s’agit là que d’une traduction post-traumatique à prendre en compte.

Avoir une prédisposition pathologique ne veut pas dire pour autant que cette pathologie va se révéler.

En revanche, un fait traumatique et ses conséquences très souvent brutales, engendrent une décompensation qui va faire le lit de cet état antérieur qui ne demandera qu’à émerger.

Cette situation va donc aggraver le tableau clinique de la victime.

C’est ce que rappelle justement l’arrêt rendu par la Cour de Cassation susvisé.

Accident de la circulation et etat anterieur

En septembre 2013, une personne était victime d’un accident de la circulation.

A la suite de cet accident, il a été diagnostiqué un syndrome de défilé thoraco-cervico-brachial qui nécessitera une intervention chirurgicale.

La victime engagera une procédure en indemnisation des suites de ses blessures.

L’assureur va considérer que la décompensation du syndrome du défilé thoraco-cervico-brachial n’était pas une conséquence directe de l’accident et va s’opposer à la mise en place de l’expertise médicale.

L’assureur estimera que le lien de causalité entre le fait générateur et le dommage n’était pas certain puisque la pathologie présentée par la victime existait depuis l’enfance et n’avait été révélée que très tardivement, ce qui, selon lui, exclurait tout lien de causalité direct et certain avec l’accident.

Douleurs apparues posterieurement à l’accident

La Cour d’Appel va relever que ce n’est qu’après l’accident que la victime va présenter des douleurs correspondant au syndrome du défilé thoraco-cervico-brachial.

Ces douleurs auraient dû normalement s’atténuer par la prise de traitement habituellement prescrit.

Or, elles vont persister, des examens supplémentaires vont être réalisés et ce syndrome va être mis en évidence en 2014, huit mois après l’accident puis traitée chirurgicalement ensuite.

Cette anomalie connue chez la victime depuis son enfance, n’occasionnait cependant aucune douleur et ne donnait lieu à aucun traitement.

Aucun symptôme en rapport avec cette pathologie, n’avait été stigmatisée avant l’accident.

En outre, l’Expert devait retenir un lien de causalité certain entre l’accident et la décompensation du syndrome.

En conclusion, même si l’anomalie du défilé thoraco-cervico-scapulaire de la victime était connu depuis son enfance, elle n’occasionnait aucune douleur et ne donnait lieu à aucun traitement, de sorte que le syndrome douloureux apparu huit mois après l’accident de la circulation, qui a été ainsi révélé par le fait dommageable, est bien une conséquence directe et donne droit à indemnisation pour la victime.

Cette jurisprudence confirme les décisions précédentes

La prédisposition pathologique, voire une pathologie préexistante à un fait traumatique ne peut venir limiter l’indemnisation du préjudice corporel subi par la victime et ce, dans la mesure où les effets délétères de cette pathologie ne se sont jamais révélés.

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