Examen d’un arrêt rendu par la 2ème Chambre Civile de la Cour de Cassation le 15 juin 2023 (n°21-14.197).
LES FAITS
Monsieur B, victime d’un accident de la circulation survenu le 15 mars 1998, avait conclu le 2 juillet 2002 avec l’assureur, une transaction lui accordant une certaine somme « tous chefs de préjudices confondus, hormis les frais d’appareillage à charge ».
En 2015, la victime va saisir le Juge des référés en se prévalant d’une aggravation de son préjudice.
Le Juge ordonnera une expertise médicale et l’Expert conclura à l’absence d’aggravation, tant fonctionnelle que situationnelle, mais retiendra l’existence de nouvelles douleurs et la nécessité de nouveaux soins
Monsieur B saisira le Tribunal de Grande Instance d’une demande en indemnisation de l’aggravation de son état de santé et sollicitera, notamment, la prise en charge des frais liés à l’acquisition de prothèses et d’un fauteuil roulant plus performant.
Sur Appel de la compagnie d’assurance, la Cour a décidé de déclarer irrecevables comme prescrites, les demandes formulées par Monsieur B, relatives aux dépenses de santé d’appareillage.
En effet, la Cour d’Appel retenait qu’à la date de consolidation, soit le 15 mars 2000, les besoins en appareillage de Monsieur B étaient connus et n’avaient pas évolué depuis, aucune aggravation fonctionnelle n’ayant été constatée.
La Cour d’Appel ajoutait que, s’agissant de l’aggravation situationnelle alléguée par la victime, les progrès technologiques des appareillages n’avaient pas entraîné de dégradation de la situation de celle-ci et que la décision de pratiquer le basket, qui le conduisait à solliciter la prise en charge d’un fauteuil roulant spécifique, datait de 2008.La Cour de Cassation a donc considéré que la Cour d’Appel, qui avait fait ressortir que les préjudices dont il était demandé réparation, ne résultaient pas d’une aggravation de l’état de santé de la victime et ne constituaient ni une aggravation situationnelle, ni un préjudice nouveau, avait exactement retenu que ces demandes, présentées postérieurement au 15 mars 2010, se heurtaient à la prescription et s’avéraient donc irrecevables.
Intéret de la décision sur la notion d’aggravation fonctionnelle ou situationnelle
L’arrêt de la Cour de Cassation fait une exacte application de l’article 2226 du Code Civil.
La Cour d’Appel qui, en l’absence d’aggravation de l’état de santé de la victime, déclare prescrite la demande d’indemnisation de frais liés à l’acquisition de prothèses et d’un fauteuil roulant, présentée plus de dix ans après la date de consolidation, ne fait qu’appliquer la jurisprudence actuelle en retenant que ces frais ne constituent ni une aggravation situationnelle, ni un préjudice nouveau.
Reflexion sur la réparation du préjudice
A la lecture de cette décision, il est permis de se poser la question afin de savoir comment garantir à la victime l’accès à un appareillage performant, qu’il s’agisse du souhait émis par la victime d’accomplir de nouvelles activités, ou qu’il s’agisse simplement de bénéficier des progrès technologiques.
A la lecture de cette décision, nous pouvons donc imaginer que l’acquisition de matériel prothétique plus performant devrait être prise en charge par les organismes sociaux, sauf pour la jurisprudence, à élargir considérablement le périmètre de la notion d’aggravation situationnelle afin de transférer, sur l’assureur, la charge de cette dépense.
Autre solution :
En vertu du principe « rien que le préjudice mais tout le préjudice », il s’agirait alors de réformer profondément le droit de l’indemnisation et choisir le versement d’une rente révisable en fonction de l’évolution du matériel sur le marché plutôt que de verser un capital à la victime.
L’amélioration du sort des victimes est un combat permanent en évolution constante.
Notre Cabinet demeure à votre disposition pour vous apporter tous renseignements complémentaires utiles à ce sujet.
Cabinet CONSOLIN ZANARINI
Les Avocats de la réparation du dommage corporel