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L'indemnisation par le Fonds de garantie

Double condition pour une indemnisation par le Fonds de garantie d’une victime d’accident du travail

Le cabinet Consolin et Associés par une excellente décision rendue par la Cour d’appel d’Aix-en-Provence dans un arrêt du 12 juin 2020 a permis à une victime d’accident du travail d’obtenir la reconnaissance de son droit à indemnisation par le Fonds de garantie qui a été condamné à lui verser une provision de 300.000 euros.


Les circonstances de l’accident du travail

En 2017, la victime était intervenue en qualité de sous-traitant sur un chantier de construction de grande ampleur dont la réalisation était confiée à une entreprise principale.

Alors qu’elle était équipée de son casque et se dirigeait vers son véhicule pour y ramener ses outils, elle recevait sur la tête un projectile provenant des étages supérieurs.

Ses séquelles sont lourdes : paraplégie associée à une tétraplégie en l’état de la parétique des membres supérieurs.

Condamné en première instance, par la Commission d’indemnisation des victimes d’infraction, au versement d’une provision de 50.000 euros, le Fonds de garantie a interjeté appel de la décision aux motifs que

  • La victime ne rapportait pas la preuve que les faits présentaient le caractère matériel d’une infraction ;

Et, à tout le moins, en soulignant que :

  • L’accident devait être qualifié d’accident du travail rendant irrecevable la demande indemnitaire formulée.

La Cour d’appel allait donc devoir préciser les conditions permettant à une victime d’accident du travail d’être indemnisée par le Fonds de garantie.

Deux conditions cumulatives doivent-être réunies pour qu’une victime d’accident du travail puisse bénéficier d’une indemnisation par le Fonds de garantie

Faits présentant le caractère matériel d’une infraction en accident du travail

l’independance de la civi dans la qualification juridique des faits

Le Fonds de Garantie considérait que les éléments de l’enquête produits par la victime ne suffisaient pas pour retenir le caractère matériel d’une infraction dès lors que la cause et la nature de l’accident ainsi que les suites pénales réservées à cette affaire demeureraient inconnues.

Il prétendait à ce titre que les faits pourraient être de nature accidentelle et que le jet d’un objet lourd d’un étage ne ressortait que d’une hypothèse.

Et, dans ces conditions, s’agissant d’une atteinte involontaire à l’intégrité physique l’intervention du Fonds était donc exclue ou en tout cas prématuré, justifiant qu’une demande de sursis à statuer soit formulée.

Or, nous avons pris soin de rappeler qu’en la matière la procédure devant la C.I.V.I ( Commissions d’Indemnisation de Victimes d’Infractions) est totalement indépendante de la procédure devant la juridiction pénale.

Les commissions n'ont pas à qualifier une infraction au sens de la qualification devant les juridictions répressives, elles déterminent simplement si le préjudice de la victime découle de faits constitutifs d'une infraction.

En l’état des éléments de l’enquête pénale et de l’enquête de l’inspection du travail qui ont été communiqués, la Cour a donc justement considéré qu’elle disposait des éléments lui permettant de statuer sans qu’il soit nécessaire d’attendre l’issue de la procédure pénale en cours ouverte du chef de blessures involontaires.

En effet, les données obtenues à travers ces éléments constituaient des présomptions graves, précises et concordantes permettant d’établir que la victime avait été blessée par la chute d’une palette projetée par un tiers ou tombée, en l’absence de dispositif anti-chute approprié, depuis les étages du bâtiment en construction, au mépris de toute règle de prudence et en violation des prescriptions du plan général de coordination en matière de sécurité et de protection de la santé applicable sur le chantier, non respecté ou non mis en œuvre.

De tels manquements constituaient des fautes d’une particulière gravité exposant les ouvriers tel que la victime à un risque de blessures graves ou de mort que son auteur ne pouvait ignorer et également en infraction avec les dispositions légales applicables en matière de sécurité au travail.

C’est ainsi qu’a été qualifié l’infraction commise au préjudice de notre client dont la gravité justifiait l’application des dispositions de l’article 706-3 du code de procédure pénale selon lequel « toute personne ayant subi un préjudice résultant de faits, volontaires ou non, présentant le caractère matériel d’une infraction peut obtenir la réparation intégrale des dommages qui résultent des atteintes à la personne notamment lorsqu’elles ont entraîné la mort, une incapacité permanente ou une incapacité totale de travail personnel égale ou supérieure à un mois. »

Faits imputables à un tiers n’ayant ni la qualité d’employeur de la victime, ni de préposé de celui-ci

Une definition particuliere du tiers

Par principe l'action en réparation du dommage résultant d'une infraction qui constitue un accident du travail ne peut être intentée que devant la juridiction civile.

En revanche, la victime d’un accident du travail conserve la possibilité de demander réparation à l’auteur de l’accident qui n’est ni l’employeur, ni le préposé de celui-ci selon les règles du droit commun, lequel inclut la CIVI.

En l’espèce, il ressortait des éléments du dossier que notre client avait reçu cette palette du fait des agissements d’un salarié d’une autre société sous-traitante.

Le Fonds tentait alors de démontrer que cette condition de tiers n’était pas acquise aux faits de l’espèce aux motifs qu’une situation de travail en commun avait pour effet d’interdire tout recours de droit commun à l’encontre de l’un quelconque des préposés de l’une des entreprises concernées.

En effet, est considéré comme « tiers » toute personne étrangère à l’entreprise qui, au moment de l’accident, n’avait pas la qualité de préposé occasionnel ou n’effectuait pas de travail en commun avec l’employeur.

La notion de tiers trouve donc ses limites en cas de travail en commun, c'est-à-dire lorsque les salariés de plusieurs entreprises, bien que se livrant à des tâches différentes, travaillent sous une direction unique pour un objet commun.

Mais, c’est grâce à une analyse précise des pièces versées aux débats que nous sommes parvenus à établir que l’accident était effectivement imputable à un tiers au sens de la loi permettant ainsi à la victime de solliciter son indemnisation auprès du FGTI.

C’est ainsi que la Cour à rappeler à travers cet arrêt les deux conditions cumulatives permettant à une victime de bénéficier d’une indemnisation par le Fonds de Garantie dans le cas particulier d’un accident du travail : les faits doivent présenter le caractère matériel d’une infraction et être imputable à un tiers.

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