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Reparation du prejudice et incidence professionnelle

Parmi les postes de préjudice réparables envisagés par la nomenclature DINTILHAC, il existe : l’incidence professionnelle.


Celle-ci a pour objet d’indemniser « …les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle, comme le préjudice subi par la victime en raison de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte de chance professionnelle ou de l’augmentation de la pénibilité de l’emploi qu’elle occupe, imputables au dommage ou encore du préjudice subi qui a trait à sa nécessité de devoir abandonner la profession qu’elle exerçait avant le dommage au profit d’une autre qu’elle a dû choisir en raison de la survenance de son handicap. »

Nous trouvons également dans ce poste de préjudice, les frais de reclassement professionnel, de formation ou de changement de poste qui sont souvent oubliés et dont les sommes sont parfois importantes surtout lorsque la victime elle-même a décidé après sa consolidation, de suivre une nouvelle formation afin de retrouver une activité professionnelle adaptée à son handicap.

Cas pratique : une victime qui exerce une activité professionnelle physique dans le bâtiment

Imaginons concrètement le cas d’une victime qui exerce une activité professionnelle physique dans le bâtiment et qui du fait de l’accident ne peut plus porter de charges lourdes ou maintenir une station debout prolongée.Cette victime pourra donc réclamer la réparation de « l’incidence professionnelle » dû à l’accident du fait de la pénibilité accrue dans l’exercice de son travail, de sa dévalorisation sur le marché du travail, de la perte de promotion professionnelle, de l’obligation de suivre une formation de réorientation,…

Très récemment, la Cour de Cassation a rendu un arrêt en date du 13 juin 2019, particulièrement intéressant sur lequel il convient d’insister.

Les faits 

Après avoir été brûlé par l’explosion d’un bûcher dressé à l’occasion d’une manifestation festive, une victime a décidé d’assigner l’assureur de l’organisateur de la manifestation afin d’obtenir réparation de ses préjudices.Parmi ses préjudices, la victime avait indiqué avoir subi une incidence professionnelle. Celle-ci a été indemnisée par la Cour d’Appel à hauteur de 20.000 €.

L’évaluation forfaitaire n’est pas recevable

Pour justifier l’allocation de cette somme, la Cour d’Appel constate que depuis son accident, la victime éprouve de plus grandes difficultés à exercer son métier qui par définition était déjà difficile.

La victime considérait que son taux de pénibilité s’était accru de 20% et justifiait ce taux par la production de nombreux documents, ce que la Cour d’Appel devait rejeter, estimant qu’aucun élément objectif ne permettait de retenir un tel taux. Une somme de 20.000 € forfaitaire était donc allouée à la victime par la Cour ce qui correspondait à la somme proposée par l’assureur

La Cour de Cassation rappelle le principe de réparation intégrale

La Cour de Cassation, dans son arrêt, rappelle une fois de plus, l’importance du principe de la réparation intégrale et insiste sur le fait que la réparation du préjudice doit correspondre à ce dernier et ne saurait en aucune manière être appréciée de manière forfaitaire.

Ce n’est pas la première fois que la Cour de Cassation rappelle ce principe qui est souvent écorné par les Tribunaux et les Cours d’Appel qui, par facilité, entendent réparer forfaitairement le préjudice subi par la victime, ce qui est tout à fait contraire au principe de réparation intégrale.

Dans l’arrêt qui nous occupe, la position retenue par la Cour d’Appel est étonnante non pas quant à la somme allouée à hauteur de 20.000 €, mais quant au raisonnement adopté.

Une fois l’incidence professionnelle admise dans son principe, il convient d’évaluer celle-ci. La victime estimait que la pénibilité de son travail s’était accrue de 20% dans les suites de l’accident après sa consolidation.

La Cour d’Appel considérait que la victime ne fournissait aucun élément objectif permettant de retenir un tel taux et que dans ces conditions, il convenait d’allouer une somme forfaitaire.

La Cour de Cassation a donc rejeté ce raisonnement.

En matière de réparation, on ne peut faire de l’à peu près, du bricolage ou du forfaitaire.

La Cour aurait dû être plus explicite et indiquer pourquoi la somme de 20.000 € apparaissait suffisante pour réparer le préjudice de la victime et pourquoi la pénibilité accrue du travail à hauteur de 20 % n’était pas fondée.

Le principe est une nouvelle fois rappelé et il convient de s’en réjouir.

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